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L'ACTU / Histoire d'actu
Dimanche 28 septembre 2014
D’hier à aujourd’hui
Les chiffres
Le samedi 4 octobre prochain, le roi des Belges Philippe, vient célébrer l’accueil du gouvernement belge à Sainte-Adresse. Les délégations officielles sont attendues à 10 h à l’aéroport d’Octeville-sur-Mer. d’Octeville-sur-Mer. Elles seront accueillies à la mairie à 10 h 30 pour la signature du Livre d’Or et l’inauguration d’une plaque commémorative. À 11 h, le cortège officiel rejoint la place Clemenceau où auront lieu un dépôt de gerbes devant la statue du Roi Albert-1er avec des détachements belges et français et les discours. Après le déjeuner se tient à 14 h 30 un meeting aérien devant les plages de Sainte-Adresse et du Havre avec la Patrouille de France, la Patrouille belge et avions de chasse, avions de collection, saut de parachutistes, démonstrations du champion du monde de voltige en présence de navires des flottes belges et françaises.
15 000. 000. C’est le nombre de réfugiés et militaires belges qui ont travaillé pour le complexe militaro-industriel installé en Normandie pendant la Grande Guerre. 1 500. Jusqu’à 500. Jusqu’à 1 500 réfugiés ont travaillé sur le port du Havre, devenu base logistique des marines marchandes et militaires belges. Le Havre devient ainsi la seconde base arrière après Calais. Le roi Philippe, le 4 août dernier, à Liège
Réfugiés belges en Normandie Guerre.
En octobre 1914, des milliers de Belges fuient les combats et les Allemands et se réfugient notamment en Normandie. Le gouvernement gouverneme nt s’installe à Sainte-Adresse. Sainte-Adres se. Les ouvriers relancent les usines d’armement.
Pendant ce temps-là Sur le front, on parle de course à la mer, qui désigne les combats qui se déroulent, en septembre et octobre 1914 dans les plaines du nord de la France, après la défaite de l’armée allemande sur la Marne et son repli sur l’Aisne. Il s’agit pour les deux belligérants, les Allemands et les Franco-Britanniqu Franco-Britanniques, es, de tenter de prendre à revers l’aile de l’armée adverse située le plus au nord, pour réaliser une manœuvre d’encerclement. Il en résulte une série de mouvements qui remontent progressivement vers la frontière belge et les rivages de la Mer du Nord, où la « course à la mer » vient mourir à la fin d’octobre pour céder la place à la guerre de position. Dans cette phase de près de deux mois, les Allemands ont presque toujours l’initiative, les Alliés étant amenés à colmater dans l’urgence et l’improvisation des brèches susceptibles de menacer les ports de la Manche, devenus vitaux pour maintenir la liaison avec la Grande-Bretagne.
amedi prochain, le roi des Belges Philippe vient célébrer les cent ans de l’arrivée du gouvernement belge à Sainte-Adresse. Mais pas seulement. « Entre le 12 et la fin octobre, octobre, plus de de 50 000 000 ré- fugiés belges ont ont transité transité par par la gare gare de Rouen Rouen », explique Jean-Pierre Popelier, auteur d’un livre sur l’exode belge, et spécialiste de l’immigration belge en France. « En Haute-
S
Normandie, ce sont surtout des Flamands qui trouvent refuge. » Alors que le gouvernement
s’installe à Sainte-Adresse, les réfugiés arri ve nt pa r tr ai n à Ro ue n, pa r ba te au au Havre. Les autorités sont débordées, et délèguent aux préfets qui eux-mêmes cherchent de l’aide auprès des maires. Du côté de la population, l’accueil n’est pas tou jours exemplaire. « On se méfie de ces gens
qui parlent une langue qui sonne comme de l’al- lemand », assure l’historien, « et si certains étaient des espions ? ». D’ailleurs, ils sont
« assignés » à résidence, avec interdiction d’aller à plus de dix kilomètres de l’endroit où ils sont logés. Mais rapidement, autorités belges réfugiées en France et autorités françaises vont tirer profit de cet afflux de main-d’œuvre qualifiée. « De nombreux dockers du port d’Anvers
21 juillet 1918, fête nationale belge. Défilé des troupes alliées, avenue des Régates. (Collection Archives municipales du Havre)
sont mobilisés sur place. » Les armuriers de
Liège, mais aussi de Herstal, ont une renommée mondiale. En un temps record, on implante une usine de pyrotechnie sur cinq hectares dans le quartier de Graville au Havre. « A la mi 1915, Le Havre est un
sont installées. Sur le port sont regroupés tous les navires marchands et militaires belges qui ont échappé aux Allemands. À Rouen, c’est l’ensemble l’ensemble du matériel matériel ferroviaire qui est stocké dans la gare de triage. « Il va y avoir jusqu’à 7000 7000 agents et
centre de fabrication de matériel militaire où la main-d’œuvre est totalement belge », détaille
700 locomotives et belges. L’une a quitté la Bel- gique sous sous les tirs tirs de mitrailleuse mitrailleuse », assure l’au-
Jean-Pierre Popelier. Mais le 11 décembre 1915, l’usine est pulvérisée par une explosion que l’on entend jusqu’à Rouen. On compte 135 morts et 1 500 blessés dans les usines alentour, comme Schneider. Du sont emba embauché uchéss à Rouen Rouen et au Havre pour pall pallier ier coup, le site est éclaté en trois. À Graville l’absence des ouvriers partis au front » . D’au- un atelier de fabrication de munitions, à tres vont être réquisitionnés pour les usines Gainneville le site de fabrication de poudre d’armement, dans la banlieue havraise. et à Sainte-Adresse, deux usines de matériel « Ils étaient surveillés comme des militaires. Ils d’artillerie et de fabrication automobile
Des soldats belges, sur le cours Boieldieu à Rouen
teur. Passées la surprise et la panique, les autorités rendent hommage aux réfugiés. A Rouen, le boulevard Cauchoise devient le boulevard des Belges. Pris de court, les Havrais donnent au boulevard maritime le nom du roi Albert 1er. À Paris, la station de métro Berlin prend le nom de Liège. Le fameux café viennois devient café liégeois. Mais la guerre que l’on croyait gagnée
Siège du gouvernem gouvernement ent Belge au Havre (Association pour le patrimoine de Sainte-Adres Sainte-Adresse) se)
avant Noël dure, toujours plus meurtrière. « Quand le dimanche à l’église, on égrenait la liste des morts au champ d’honneur, la présence de réfugiés était souvent mal supportée par une po- pulation féminine souvent en deuil d’un pro- che », raconte Jean-Pierre Popelier.
Considérés comme des « planqués » en France, ils le seront aussi lors de leur retour en Belgique. « L’accueil fut souvent glacial, voire haineux de la part des « occupés » belges. » On comprend mieux alors pourquoi certains ont refait leur vie en France, et pour certains en Normandie. OLIVIER CASSIAU
Le premier exode, la grande guerre des réfugiés belges en France, par Jean-Pierre Popelier, Popelier, 18 € aux éditions Vendemiaire.
Funérailles des victimes de l’explosion du 11 décembre 1915 : les cercueils dans la cour du lycée. (Bibliothèque municipale du Havre)